Dessin d’un homme qui est en partie un agriculteur, en partie un homme d’affaire, montrant que la collaboration à la fois au niveau local avec les agriculteurs et au niveau international  est nécessaire au succès dans l’agri-business

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L’entrepreneur collaboratif

Quel avenir ? Quel profil ? Comment l’identifier et le développer ?

Publish Date: décembre 3, 2020

Read Time: 12 min

Author: Thomas Philippe et Laurence Pintenat

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Il est évident que la crise sanitaire et économique a accéléré les différentes pressions qui s’exercent aujourd’hui sur les organisations mais a également créé des opportunités de croitre différemment :

  • Que ce soit parce que les modèles business sont arrivés au bout de leur efficacité ou à cause de la crise sanitaire et économique, nos Organisations sont confrontées à l’impérieuse nécessité de se réinventer ou se diversifier et vite, en gardant le long terme à l’esprit.
  • Pour certains la problématique est de continuer à assurer une croissance globale sans perdre leur agilité en réussissant à responsabiliser le local. Pour d’autres, il s’agit de trouver urgemment des leviers de croissance.
  • L’appel gouvernemental à rebâtir la souveraineté nationale encourage l’autonomie, tout en gardant ses connexions avec les autres pays.

Entreprendre et innover pour grandir et assurer la performance. Cultiver la curiosité et la collaboration au-delà des silos et frontières, pour paradoxalement recouvrer l’autonomie. Tels sont certains des challenges pour faire face aux nouveaux besoins créés par les conséquences de la pandémie.

Dans la réalité, selon le secteur d’activité et la culture ancrée, mener la transformation nécessaire, tout en s’assurant que la performance est au rendez-vous est un exercice difficile, mais pas impossible.  

Comment par exemple le secteur de l’agri-business, et notamment le monde des coopératives gère-t-il ces challenges et paradoxes ?

Qu’y a-t-il de si particulier dans la culture et le mode de gouvernance des coopératives agricoles ?

La résilience est dans l’ADN du monde agricole et dans le mode de gestion des coopératives.

Le temps long de la culture, l’imprévu climatique, la non-maitrise du temps que l’on ne peut ni accélérer ni ralentir car il suit les saisons ; tout cela participe à la maitrise de soi dans les temps difficiles et fait que les coopératives agricoles ont une capacité d’ajustement hors pair ! La coopération, c’est aussi savoir que cette aventure est une aventure collective, que nous construisons pour et avec l’autre, pour le futur et que quelqu’un sera toujours à nos côtés pour nous aider et prendre la relève.

Cette résilience, une coopérative comme Limagrain a su la transmettre de ses agriculteurs à ses employés salariés en adoptant une gouvernance où salariés et agriculteurs travaillent étroitement sur les sujets locaux comme internationaux. La connaissance et la gestion de l’international, tout en étant très réactif localement : c’est la définition et la force de cette coopérative.

Que cela implique-t-il comme style de leadership ?  Pourquoi ?

Cette particularité nécessite avant tout une grande ouverture d’esprit, car jongler avec de l’international, en ayant toujours à l’esprit la performance business pour le bien de la coopérative et de ses agriculteurs n’est pas innée et n’est pas exactement le modèle qu’on nous a enseigné. «Faire pousser des plantes localement» et «Sélectionner des variétés de semences qui apportent par le progrès génétique des solutions aux agriculteurs du monde» sont deux business modèles différents avec des problématiques bien différentes. Faire le lien entre les deux n’est pas évident. C’est un apprentissage qui peut s’avérer ardu, mais quand ces notions sont intégrées, quel plaisir de pouvoir passer d’un schéma à l’autre (gymnastique intellectuelle et émotionnelle), en y trouvant toujours un fil conducteur et en se projetant dans le long terme.

Comment arriver à passer le cap ? En étant dans l’apprentissage perpétuel, au contact des autres ; en se nourrissant de la diversité et en nourrissant les autres de sa propre diversité. La collaboration entre les personnes, les modes de fonctionnement et les cultures prennent ici tous leurs sens ; il faut donc trouver toutes les occasions pour développer la collaboration, prendre le temps de comprendre et d’échanger pour ensuite performer rapidement dans une optique long terme ; à rebours de la recherche de résultats immédiats qui sont souvent destructeurs de la croissance future car pas assez partagés et confrontés à d’autres réalités et modes de pensés.

C’est donc un style de leadership qui laisse une large place à l’observation et aux interactions au-delà des frontières, qu’elles soient géographiques ou fonctionnelles ; qui favorise l’expérimentation, la transformation des idées en actions et la prise de risque pour entreprendre, tout en faisant réfléchir sur les impacts à long terme. 

Ces qualités sont-elles développables ?

Identifier et développer des entrepreneurs collaboratifs ?

Le premier challenge pour identifier un entrepreneur collaboratif est de créer un profil très clair du type de leader que vous recherchez, et de récolter des informations à la fois spécifiques et objectives renseignant ce profil.

Pendant ces 50 dernières années, DDI a réalisé 120 000 évaluations de leaders (comportementales et de personnalité). Pour se faire, nous nous sommes immergés dans le monde de milliers d’entreprises pour comprendre le type de leaders qu’elles ont recrutés ces 10 dernières années, comparé à celui dont elles auront besoin dans le futur.

Un profil d’entrepreneur ressemble souvent à celui-ci, selon nos données :

Une ambition élevée, une prudence modérée, une très grande curiosité, une appétence pour apprendre, une capacité à naviguer dans l’incertitude, l’attirance pour la nouveauté, l’ouverture au changement, le goût du risque mais mesuré, une forte capacité de persuasion ; sous pression parfois de l’arrogance, une tendance à l’impulsivité, une recherche de l’attention des autres. Ces personnes aiment s’exposer socialement, mais leur sensibilité interpersonnelle est plutôt basse. Elles créent et développent des affaires, sont plus intéressées par le « quoi » que le « comment ». Une fois les initiatives créées, et mises sur les rails, elles ont tendance à passer à autre chose.

Un entrepreneur collaboratif aurait toutes ces caractéristiques, à ceci près : une sensibilité interpersonnelle beaucoup plus affirmée, une arrogance moindre, un sens de l’inclusivité beaucoup plus développé, une compétence de collaboration transversale certaine, une ambition long-terme et pas seulement court terme (capacité à prendre en compte les conséquences long-terme de ses décisions). En résumé : un parfait équilibre entre un sens aigu des affaires et du marché local et international, le goût du risque mesuré, une vision transversale et long terme incluant les impératifs court terme, la capacité à être modèle dans la collaboration au-delà des silos et à encourager ce mode de fonctionnement autour de lui/elle. Ceci implique l’intérêt pour les personnes aussi bien que pour le business. S’intéresser, c’est être curieux en posant par exemple des questions ouvertes et c’est intégrer dans l’action ce qu’on a appris au plan cognitif et ressenti (répondre ou agir avec empathie) pour faire avancer les affaires ou projets.

Mouton à cinq pattes nous direz-vous ? Peut-être. Mais certaines de ces caractéristiques peuvent se développer pour autant qu’une identification fine et objective de la « photo de départ » soit faite et qu’un développement ciblé sur les compétences critiques à fort impact se réalise pleinement. Des outils objectifs d’évaluation comportementales et de personnalité existent. L’objet de ce blog n’est pas de les détailler. Si toutefois vous êtes intéressé-e par une comparaison de votre expérience, voici un lien qui nous espérons vous sera utile :  Leadership_assessment

Une fois le potentiel pour être ou devenir un leader « entrepreneur collaboratif » établi, l’étape d’après consiste à déterminer la façon la plus adaptée d’accélérer le développement. Ce n’est pas parce qu’il ou elle a le potentiel, qu’il ou elle « sait ou saura faire ».

Ces derniers temps, le développement a tendance à se résumer à l’accès en ligne de e-learning ou webinaires. Dans le passé, les participants étaient rassemblés en cohorte, planchant sur des «business cases » et mettant en œuvre des connaissances ou des idées le plus souvent déjà appliquées dans le passé. L’approche développée dans la suite de ce blog est davantage de les doter de compétences, leur donner l’opportunité d’expérimenter de nouvelles situations qui les mettraient en dehors de leur zone de confort, tout en bâtissant leur confiance.

Révéler le potentiel d’un réel entrepreneur collaboratif

Il s’agit donc de donner des opportunités d’expérimenter de nouvelles situations pour développer des compétences orientées vers le business et l’humain.

Selon les recherches_menées_par_DDI, 5 compétences sont particulièrement importantes pour générer une croissance rentable :

  • Esprit entrepreneurial
  • Maîtrise du monde des affaires
  • Assurer l’exécution de la stratégie
  • Prise de décision
  • Gérer le changement

La gestion du changement est certainement celle qui inclut les aspects humains les plus critiques et laisse une large place à l’intelligence émotionnelle. Pour faciliter les transitions, l’entrepreneur collaboratif doit s’attacher à comprendre les différentes réactions possibles au changement ; aider les autres à surmonter leurs résistances au changement en démontrant une sensibilité aux peurs ou sentiments négatifs ; en leur faisant découvrir les bénéfices de ces changements ; en les engageant à travers l’expression et la prise en compte de leurs idées pour la réalisation des changements nécessaires.

Bien sûr, vous pouvez toujours expliquer à ces leaders quelles sont les attentes de l’Entreprise. Ceci comme première étape, mais qui restera complètement cognitive. Et si vous pouviez leur faire ressentir ce que vous voulez réellement dire ?  

Reproduire une expérience très proche du réel, simulée dans un environnement sécure, incluant des attentes très clairement définies est une alternative moins risquée que de donner immédiatement la responsabilité d’une charge de leadership aux candidats identifiés. Intégrer cette simulation dans un programme de développement au sein d’une session collective est une pratique qui a fait ses preuves.

Une telle immersion permet aux participants d’expérimenter des rôles et contextes variés de leadership, de récolter des feedbacks de leurs pairs ou coachs, et de penser activement au « comment » ils vont mettre en œuvre leur propre plan pour résoudre leurs problématiques terrain.

L’étape d’après est de fournir de réelles opportunités terrain de développement : que ce soit par des expatriations ou bien des missions à durée limitée dans d’autres Business Units, la confrontation aux différentes réalités du monde ou de l’Organisation est essentielle.

Thomas Philippe a fait ce voyage, au sens propre et figuré, en prenant des responsabilités de manager opérationnel puis de cadre dirigeant en France, au Maroc, au Chili et au Vietnam ; et en faisant l’expérience de deux types d’organisation : celle des Semences et celle de la Coopérative. C’est au cours d’un échange qui à l’origine se voulait informel que nous avons identifié ensemble le besoin de ce profil d’Entrepreneur Collaboratif, dans le monde de l’Agri-business, mais par extension, peut-être également dans tout secteur d’activité à forte Technicité et Expertise dont le challenge serait de capter avant l’heure les opportunités marché et d’engager très rapidement les différents services de l’entreprise pour transformer ces opportunités en réalité.

Comment se révèle-t-on son potentiel en tant que leader entrepreneur collaboratif ?

Il n’y a, bien sûr, pas de schéma établi. Le cheminement personnel est important, mais avoir dans son environnement professionnel une personne qui vous fait confiance, et qui prend le temps de vous parler est essentiel.  Les mises en situation préparent, et développent la prise de conscience et la confiance. Les simulations du type « une journée dans la vie d’un manager opérationnel ou stratégique » sont de réels révélateurs et fournissent des données précieuses pour bâtir des plans de développement. Des situations terrain extrêmes et complexes qui nous renvoient à nous même, accélèrent encore davantage notre transformation. Mais toute la puissance de la révélation du potentiel d’un entrepreneur collaboratif réside au-delà de son talent à prendre des risques et innover, dans sa capacité à engager des équipes diverses, et faire en sorte qu’elles collaborent entre elles, afin d’accélérer les transformations business nécessaires.

Pas de recette magique, juste une expérience analysée avec le recul, dont voici quelques ingrédients :

  • Malgré la pression du temps, et paradoxalement, prendre le temps de s’immerger dans, et de comprendre un nouvel environnement est essentiel pour prendre conscience de ses propres réactions, et agir avec le maximum d’impact. L’histoire du pays par exemple, ou celle des équipes. L’observation active et la phase d’analyse qui s’en suit, sont critiques pour préparer et adapter ses communications envers les équipes. L’enjeu est de pouvoir formuler des messages clairs et facilement reprenables dans toutes les situations, par tous.
  • L’empathie : celle qui donne la capacité à agir de telle sorte à ce que l’autre ait un sentiment immédiat que vous avez compris ce qu’il/elle ressent et pourquoi. Les situations où l’on ne parle pas parfaitement la même langue que les membres d’équipe sont intéressantes à cet égard car le défi est de créer une proximité qui ne passe pas forcément par les mots. Un indicateur d’efficacité de ce type d’empathie est non seulement une confiance et performance accrues, mais également le fait de créer une réciprocité dans l’envie et la capacité à s’écouter mutuellement.
  • Le doute : la confiance en soi et détermination en tant qu’entrepreneur ne doit pas empêcher cet état d’esprit personnel où dans les moments de réflexion individuel, on se pose les questions qui remettent en cause ce qui peut paraitre des évidences.
  • L’exemplarité, que l’on soit expatrié à l’étranger ou bien affecté le temps d’une mission dans une autre Business Unit :  il est important de se rappeler que nous ne sommes que des invités, et que le respect des valeurs et façon de fonctionner de l’entité d’accueil est essentiel pour bâtir la confiance.
  • De nouveau, prendre le temps : celui de la célébration des réussites collectives.
  • Avant la fin du mandat, prendre le temps de la transmission, pour donner les clés de la continuité ; s’effacer afin que les créations et initiatives continuent à vivre en notre absence, voire se transforme en autre chose. 

Le leader Entrepreneur Collaboratif a donc un bel avenir devant lui/elle dans toutes les Organisations qui doivent faire le lien entre l’Expertise et l’Entreprenariat, et parient sur le long terme et non seulement le court terme, pour trouver un second souffle et innover rapidement sur leur marché.

Des réactions ou contributions pour étendre ce point de vue ?  Envie d’approfondir la méthode et les outils pour identifier et développer ce type de profil ? N’hésitez pas à rentrer très simplement en contact avec Thomas Philippe et Laurence Pintenat

Salarié du Groupe Limagrain depuis 22 ans, et après 13 années passées à l’international, Thomas Philippe a retrouvé l’Auvergne et le cœur du Groupe en rejoignant sa maison mère, la Coopérative, en 2020. Tisser des liens de compréhension entre les cultures, transformer et accompagner les personnes vers le développement d’une vision pragmatique de long terme et cultiver la persévérance au service du résultat collectif est ce qui l’anime au quotidien.

Basée dans le bureau de parisien de DDI, Laurence Pintenat travaille avec des entreprises internationales. Elle les accompagne dans la définition et l’implémentation de leur stratégie de leadership à travers des solutions qui soutiennent à la fois les aspects business et humains. En dehors du travail, elle a une passion pour la danse contemporaine, se produisant sur scène jusqu’alors tous les ans. L’un de ses mottos : « Le mouvement, c’est la vie » (qu’il soit rapide ou lent, grand ou petit, physique ou intellectuel). Si vous avez des questions ou souhaitez échanger sur des idées innovantes pour la mise en mouvement de vos leaders ou managers pour soutenir vos priorités stratégiques et culturelles, contactez-la simplement et spontanément :  laurence.pintenat@ddiworld.com

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